Un nom, une empreinte digitale et une photo pour les hommes. Voilà un électeur afghan de plus dans la province du Helmand, au Sud de l’Afghanistan. A Lashkar Gah, la capitale, la Commission électorale indépendante est à pied d’œuvre. L’enregistrement des votants vient de se terminer et il faut maintenant envoyer les listes électorales à Kaboul.
Au total, 149016 personnes se sont inscrites sur les listes électorales du Helmand. Cela représente à peine 15% de la population estimée de la province, pourtant l’une des plus grandes et des plus peuplées du pays. Mais c’est une province en proie à de violents combats et les autorités afghanes ne la contrôlent pas.
Abdul Hadi, responsable de la Commission électorale indépendante pour le Helmand.
Cinq districts de la province de Helmand n’ont pas pu être recensés. C’est ennuyeux qu’on ne puisse pas donner à tout le monde la possibilité d’exercer son droit de vote dans la province. Mais nous avons un plan: si la situation sécuritaire s’améliore, nous allons reprendre le recensement dans les districts.
Difficile dans ces conditions de parler d’élections libres et équitables, comme le stipule la Constitution afghane. D’autant qu’une question plus grave se pose aussi, celle de la fraude électorale… Retour à Kaboul : un habitant de la capitale accepte de témoigner sur cette pratique. Seule condition, on ne doit pas reconnaître son identité. Il a pris sept cartes d’électeur.
Le jeune homme dit que cette pratique est courante et explique pourquoi :
la rumeur court, que les candidats à l’élection vont nous donner de l’argent si on vote pour eux. Plus on a de cartes, plus on peut gagner de l’argent, c’est pour ça que j’en ai pris autant. Ici, la Démocratie est seulement sur le papier…

Faux électeurs, manque de transparence… Le processus électoral est largement décrié par la majorité des Afghans qui estime que la fraude est généralisée. Comment alors parler de Président légitime? Et comment parler de Démocratie?
L’Afghanistan est confronté à bien des difficultés pour la deuxième élection présidentielle de son histoire. Une élection financée par la communauté internationale et les Nations Unies à hauteur de quelque 230 millions de dollars.
L’Afghanistan est en pleine guerre civile, il n’est pas étonnant que toute la population n’aie pas accès au vote (cette situation me rappelle l’élection américaine de 1864, en pleine guerre civile).
Il est plus problématique que il y ait autant de corruption dans l’organisation des élections, mais il me semble que ce serait utopique d’espérer que l’organisation de celles-ci échappe par miracle à un phénomène qui gangrène toutes les institutions de l’état.
Je pense qu’en dépit de ces limitations, il est bon que les élections puissent avoir lieu, car il me semble essentiel d’ancrer le plus vite possible des habitudes de vie démocratique, si on veut un jour que la situation de ce pays se normalise. En tout cas, le pire serait de ne pas organiser des élections tant que l’administration n’est pas lavée de toute corruption, on aurait d’ici là simplement institué une dictature pure et dure.
Ceci étant dit, c’est très utile de savoir ce qui se passe, cela permet de comprendre que le prochain gouvernement ne bénéficiera pas de beaucoup de légitimité auprès de la population, ce qui est un élément important dans une guerre civile.
Sans me tromper lourdement, je dirais que le bulletin de vote ne fait pas partie de la panoplie politique afghane. Et aucun référendum n’a jamais été organisé dans ce pays, qui n’a que pu se défendre contre la foultitude d’envahisseurs voulant traverser le pays et le razzier tout à la fois. Ou lui apprendre les bonnes manières démocratiques, y compris par la force.
C’est bien de vouloir amener une société déjà très bien organisée à des concepts de sage démocratie à la mode occidentale. Auparavant, le problème d’intervenir là bas était justifié par le refus d’accès de la Russie à l’Océan indien et aux pays le bordant. Maintenant je me demande bien pourquoi on ne leur fiche pas la paix en les laissant s’arranger entre eux: ils ont toujours su y parvenir, et jusqu’à présent, l’interventionnisme russe, américain ou international n’y a créé que du sang et des larmes. Pour mémoire, dernière année du pouvoir des taliban: récolte de pavot quasi nulle. Ces dernières années, récoltes records…